Articles divers

Mérule, champignon lignivore : quels traitements pour le bois ?

macro d'une antrodia, champignon lignivore

Mérule, antrodia, coniophore ou polypore des caves, ces noms évoquent des cauchemars pour de nombreux propriétaires. Leurs ravages menacent autant la santé des occupants que l’intégrité du bâtiment.

Je vais être franc, je n’avais jamais prévu d’écrire cet article. Avec Sol-éco, j’aime dire que l’on prend soin du bois et de ceux qui l’aime.

Il y a encore quelques jours ce thème des parasites du bois me paraissait hors de ma zone d’intérêt. Vous allez vite comprendre qu’il m’est tombé dessus sans prévenir. On va donc étudier les causes du développement de ces champignons, leurs dégâts et les traitements possibles. On va y mêler notre propre expérience, notre vécu.

La Maison dans les Bois : Bientôt Expulsés ???

La Maison dans les Bois, c’est là où nous habitons et travaillons. On vous l’avait présentée dans un des premiers articles de ce blog

Nous étions prêts à changer de vie. Après plusieurs années passées dans notre maison nichée au cœur de la forêt, l’envie de simplifier notre quotidien se faisait sentir. L’idée était de vendre pour vivre différemment. Nous rêvions d’un espace plus petit, plus autonome. Un dôme géodésique par exemple… Nous travaillons énormément pour Sol-éco, geodome et Graphiqueasy.com alors nous avions envie de prendre aussi un peu de distance en voyageant plus longtemps dans l’année.

Mais tout a basculé en un instant.

En installant Starlink, j’ai essayé de passer un câble dans un endroit où je ne mets jamais les mains. En tâtonnant, dans ce « trou » de l’arrière-cuisine, j’ai senti pas mal d’humidité sous le plancher en bois… Pas bon ça !

Puis ma main a rencontré une masse spongieuse. J’en ai extrait un morceau. Un champignon !

Pas un cèpe ou une girolle, non.

Mais alors quoi ?

MERULE ???

mérule champignon lignivore dans une maison

Le bois du cadre de cette trappe est déjà atteint de pourriture cubique. Il se désagrège sous mon ongle. Le choc est immense : le plancher semble se dérober sous mes pieds. Notre maison, autrefois havre de paix, devient instantanément une source immense d’inquiétude.

Quand on découvre une telle saleté, on peut facilement se laisser gagner par la peur, la colère, la sidération. Ces émotions nous empêchent de faire fonctionner rationnellement notre cerveau.

En voyant ce champignon spongieux et blanc au creux de ma main, j’ai tout de suite imaginé la suite :

  • Vider la maison
  • Plus de foyer
  • Casser le sol
  • Tout refaire
  • Bataille d’experts : qui paye quoi
  • Des mois / années de procédure

La vie complètement chamboulée quoi !

Première étape : diagnostic biologique, mérule ou pas ?

Le choc fut difficile à encaisser.

Sophie et moi avons réagi de manière très différente. Pour ma part, je me suis senti envahi par l’angoisse et du découragement. Sophie, fonctionne différemment. Face à un problème, son cerveau mouline en permanence pour trouver des solutions. C’est un fonctionnement efficace mais épuisant.

Nous devions d’abord établir la nature du champignon et son niveau de développement.

S’agissait-il de la mérule pleureuse, redoutée pour ses ravages sur les structures en bois ?

Très vite, nous avons pris les premières mesures : un prélèvement du champignon a été effectué et envoyé pour analyse. Le verdict allait être déterminant pour envisager les solutions possibles. Un simple traitement localisé serait-il suffisant ou bien la nécessité de casser le plancher pour tout refaire. Les implications potentielles étaient énormes, tant sur le plan logistique que financier, avec la perspective de devoir quitter temporairement notre maison.

La situation était d’autant plus préoccupante que la maison avait été construite il y a seulement six ans. Elle était sous garantie décennale, mais cela suffira t’il à couvrir les réparations ?

Annoncer la nouvelle aux enfants

Sur le plan personnel, il nous a fallu expliquer la situation à nos 2 enfants de 12 et 17 ans. Ce n’est pas une mince affaire quand vous-même n’avez aucune visibilité. Comment leur faire comprendre que notre maison peut devenir inhabitable sans pour autant les mettre dans un état de stress intense ? Pour cela, Sophie est toujours exemplaire. J’ai une chance énorme de l’avoir pour épouse 😉

Elle a su trouver le moment et les bons mots pour elur expliquer la situation. En toute franchise comme à notre habitude.

Rapport d’études mycologiques

Moins d’une semaine après l’envoi de l’échantillon biologique, nous avons reçu le diagnostic. Ce n’était pas de la mérule pleureuse. Notre soulagement fûr de courte durée en apprenant le nom du coupable : antrodia sp.

On est un cran en dessous de la mérule mais il est extrêment destructeur

Ce champignon lignivore dégrade le bois humide et provoque une pourriture cubique. Il affecte la solidité de la structure du bois. Il faut retirer toutes les parties affectées.

En réfléchissant à la meilleure solution de traitement, nous constatons que le plancher en bois n’a pas été mis en oeuvre de manière correcte. Un vice de construction quoi ! Pas moyen de se glisser dans le vide sanitaire pour aller traiter. Des points de rosée sur le bois… La destruction parait inévitable.

Normalement, on commence par résoudre la cause de l’humidité. Drainage, ventilation… Ensuite, les options varient entre le traitement curatif par fongicide et le remplacement complet des parties atteintes. Des techniciens peuvent se glisser même dans des espaces techniques de 60-70cm pour aller injecter les produits au coeur du bois. Dans notre cas, ce n’est donc pas possible de traiter.

Tout casser !

Cette situation va donc impacter notre vie quotidienne et professionnelle pendant des mois. Nous ne sommes pas du tout routiniers mais il y a des limites quand même !

Les enjeux sont donc à la fois techniques, financiers, logistiques et émotionnels. Cela va certainement exiger une coordination serrée avec les experts et les artisans. Nous sommes déterminés à trouver une issue, mais le chemin promet d’être long et parsemé d’embûches.

Les quatre principaux champignons parasites du bois en Europe

Revenons un instant sur ces parasites. Un petit instant, je remets ma casquette de professionnel…

Ces quatre terreurs que sont la mérule, l’antrodia, le polypore et le coniophore des caves peuvent causer d’importants dégâts aux structures en bois. Ils prolifèrent dès que le bois est chargé à plus de 20% d’humidité. Ils aiment les lieux confinés et sombres. Leurs méfaits sont impressionnants. La première fois que j’ai tapé « mérule » dans Google, j’ai été terrorisé par les photos ! Comme la première fois où j’ai ouvert le Larousse médical chez mes parents !

Découvrons leur carte d’identité ensemble :

Mérule pleureuse (Serpula lacrymans)

C’est le champignon lignivore le plus redouté en Europe. On la surnomme la « lèpre de la maison ». Tout un programme ! Il attaque le bois humide à 22% minimum. La mérule est un peu frileuse et préfère les températures entre 20 et 25°C.

Il provoque une pourriture cubique qui affaiblit les structures. La mérule se développe dans les environnements sombres et mal ventilés, ce qui en fait un problème majeur pour les maisons anciennes. Ses filaments sont capable d’aller pomper l’eau très loin et contaminent le béton. Ils peuvent également entourer les fils électriques des vieilles installations et favoriser les incendies ! Au moins après, il n’y a plus de mérule !

Coniophore des caves (Coniophora puteana)

Également appelé « cancer du bois, » encore un joli petit nom !

Des 4, c’est celui qui demande le plus d’humidité : 50%. Autant dire qu’avec ce taux d’humidité le soubassement est mal en point. C’est souvent un signe de remontées capillaires car le coniophore ne peut pas capter d’eau par ses filaments. Côté climat, il n’est pas trop regardant et peut se développer entre 5 et 35°C. Son autre effet Kiss cool est d’attirer un autre ravageur du bois : le lyctus. Ce petit coléoptère xylophage adore se faufiler dans les fentes du chêne, du hêtre ou encore du frêne. Lui aussi boulotte votre bois et le réduit à néant.

Lyctus + coniophore, les 2 font la paire !

Polypore des caves (Fibroporia vaillantii)

Le polypore attaque principalement les bois résineux et provoque une pourriture fibreuse. Lui, il aime la douceur. 25°C. Un bon 40% d’humidité et vous avez le combo pour sa croissance optimale.

Comme le coniophore, il adore venir accompagné ! Son invité ? La grande vrillette qui va encore accélérer la dégradation du bois.

Antrodia (Antrodia xantha)

On dit « une » antrodia.

Ce champignon, que nous avons découvert dans notre maison, provoque une pourriture cubique. Il s’attaque généralement aux résineux mais parfois aussi aux feuillus. Pas besoin d’un bois gorgé d’eau pour son développement, 22% suffisent. Sa température optimale est de 22 à 27°C mais tous les mycologues ne semblent pas d’accord. Certains mettent même en doute ces allégations en répondant point par point à l’analyse des spécialistes du CTBA (j’ai vu ça ici : file:///Users/guillaumelepenher/Downloads/Fcba%20et%20Antrodia-1.pdf).

Conditions de propagation des champignons lignivores (mérule et autres)

Ces champignons se développent dans des environnements humides souvent confinés et sombres. Une mauvaise ventilation, les fuites d’eau, ou les remontées capillaires peuvent favoriser leur apparition. Pour les prévenir, il est essentiel d’éliminer les sources d’humidité et de traiter le bois de manière adéquate.

OK.

Mais réfléchissons juste un instant à la vie sans champignon lignivore…

Fini les ballades en forêt avec le panier à champignons sous le bras. Votre forêt sans champignons lignivores est devenue au fil du temps un immense enchevêtrement de troncs et de branches d’arbres ! Sur plusieurs mètres de haut… Et pas d’apport de matière organique au sol, pas de retour du carbone à la terre. Vous voyez la cata ? Donc ces champignons ont un rôle biologique énorme.

Après, c’est mieux s’ils restent dans les bois…

Prévenir et traiter les champignons lignivores

On ne va pas se laisser faire non plus en laissant le carbone de nos poutres retourner gentiment au sol de notre forêt !

Alors quelles actions pour traiter le bois malade ?

Assèchement et gestion de l’humidité

La première action est toujours de comprendre les causes de l’humidité excessive. Vous devez ensuite prendre le problème à la racine pour assécher le lieux. Ventilation, deshumidificateur, colmater les infiltrations, tout est bon pour faire chuter l’humidité.

Une inspection régulière avec mesure du taux d’humidté est requise.

Tout ce qu’on ne peut pas faire chez nous…

Traitements curatifs

Lorsque le bois est déjà atteint, il faut utiliser des fongicides adaptés pour éliminer le champignon. Dans certains cas, le remplacement des parties abîmées est inévitable. Le bois infecté doit être soigneusement enlevé, puis brûlé ou éliminé de façon sécurisée pour éviter toute contamination.

Tout ces travaux sont à confier à des professionnels certifiés CTBA +.

Dans certains cas on peut traiter avec la chaleur. On fait monter la température pendant un certain temps à un niveau donné. Cette chaleur éradique alors le champignon.

On cherche le « cadeau caché »…

Malgré cette épreuve, nous voulons rester positifs. Nous avons déjà reçu beaucoup de témoignages de soutien sur Youtube et ailleurs.

Nous avons déjà été au pied du mur dans notre vie. Dans ces moments, nous faisons toujours preuve de créativité et de résilience.

Sol-éco est d’ailleurs né comme cela.

Nous pensons chaque jour à la vie d’après en pensant :

« Quel cadeau caché cette période nous a t’elle apporté ? »

Cette crise nous permet déjà de tirer des leçons précieuses sur l’importance de la gestion de l’humidité et de la protection du bois. J’espère que cet article pourra vous aider ou aider quelqu’un dans votre entourage (pensez à lui partager)..

Prenez soin de vous et de votre bois

Guillaume de Sol-éco

4 thoughts on “Mérule, champignon lignivore : quels traitements pour le bois ?

  1. Lison dit :

    Bonjour, Guillaume,
    Je vous souhaite beaucoup de courage et de résilience dans cette épreuve ! Je comprends bien ce que vous vivez, car mon mari et moi avons rencontré des problèmes similaires et fonctionnons de manière comparable : lui peut rapidement tomber dans l’angoisse, tandis que je pars très vite dans la recherche de centaines de solutions. Ce qui est certain, c’est que vous traverserez cette situation ensemble, en famille.
    J’attends avec impatience l’article où vous dévoilerez le cadeau caché de cette épreuve !

    1. Guillaume dit :

      Merci Lison !
      Nous avançons à tâtons dans cette histoire… Je vais rapidement publier une deuxième vidéo pour partager les possibilités qui se présentent à nous. C’est pas hyper réjouissant.

  2. Merci pour ce partage, je ne savais pas que les champignons pouvaient être autant destructif. Et du coup , comment ça c’est terminé ?

  3. nathalie dit :

    Quelle histoire, en effet ! Merci pour ce partage d’expérience, qui, j’en suis sûr, pourra aider d’autres personnes. J’espère que vous trouverez rapidement une solution peu coûteuse, car les dommages émotionnels sont déjà assez lourds. J’admire votre résilience et votre capacité à trouver des points positifs dans une telle « aventure ».

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.